Malawi : comment mieux impliquer les jeunes dans l’agriculture ?

La place des jeunes en agriculture

Au Malawi, Fert intervient dans la région du Nord, dans le district de Mzimba, où 48% de la population est âgée de 10 à 35 ans ; toute personne de moins de 35 ans faisant partie de la catégorie des « jeunes ». L’économie repose principalement sur le secteur agricole qui représentait près de 25% du PIB et 75% des emplois en moyenne sur la période 2018-2020.

Bien que l’activité agricole soit génératrice d’aliments et de revenus, elle est très peu pratiquée par les jeunes qui peinent pourtant à trouver un emploi décent. Pour mieux comprendre ce désintérêt des jeunes pour l’agriculture, l’équipe de Fert Walima a recruté un jeune agriculteur, Ephraïm, président d’une organisation de jeunes agriculteurs, qui cherchait un stage pour finaliser ses études.

Interroger les jeunes pour comprendre leurs difficultés

Ephraïm s’est entretenu avec 22 jeunes et leaders paysans et a rencontré plusieurs acteurs, notamment les services de l’Etat en charge de l’accompagnement des jeunes.

En premier lieu, ce qui frappe à l’issue de cette étude c’est le poids du mariage et du patriarcat dans les stratégies d’installation des jeunes « jusqu’à leur mariage les jeunes sont dépendants de leurs parents, ils peuvent contribuer aux travaux mais sont très peu consultés dans les décisions et n’ont pas accès à la terr e» rapporte Ephraïm. Ce n’est en général qu’une fois marié que ses parents attribuent au jeune un lopin de terre afin qu’il puisse subvenir aux besoins de sa famille. Avant cela, il vit encore avec ses parents dont il dépend financièrement et il est donc considéré comme normal qu’il s’investisse d’abord dans la ferme familiale.

L’installation est souvent un défi, les jeunes manquent de connaissances agricoles et de foncier. Un jeune confie « lors de l’attribution des parcelles d’irrigation, les jeunes sont installés sur les parcelles loin des points d’eau, on ne nous consulte pas, ce n’est pas très motivant ! ».

Un leader agricole accompagné par Fert Walima explique « les connaissances, c’est essentiel pour réussir en agriculture ». A défaut de formation agricole, les jeunes qui s’installent suivent autant que possible les gestes des agriculteurs expérimentés de leur entourage. L’agriculture est encore considérée par beaucoup de parents comme une activité contraignante et peu rémunératrice réservée à ceux qui ont échoué à l’école. Beaucoup de jeunes rêvent d’étudier ou d’avoir un emploi salarié en ville plutôt que de s’investir dans la production agricole qu’ils considèrent comme une activité réservée aux adultes.

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Des jeunes femmes volontaires mais peu prises en compte

La plupart des jeunes femmes ont tendance à penser que l’activité agricole est réservée aux hommes. Ephraïm confirme « les jeunes femmes n’obtiennent généralement pas de terres en héritage car elles sont supposées suivre leur mari sur leur exploitation ». Ceci est d’autant plus vrai dans le domaine de l’élevage, une activité uniquement pratiquée par les jeunes hommes qui reçoivent en général de leurs parents, en guise de remerciement pour leur participation aux travaux de l’exploitation, une tête de bétail.

Des jeunes agricultrices et agriculteurs qui montrent le chemin

Faith Kanyenda, une jeune fille de 21 ans, célibataire, n’est membre d’aucune organisation paysanne. Sa mère lui a donné une petite parcelle de 0,25 acre pendant la saison de culture 2022-2023 sur laquelle elle a cultivé des arachides. Les revenus de cette vente ont servi à louer la parcelle actuelle, acheter des intrants et un porcelet. Sa mère ne cesse de l’encourager. Faith rêve de pouvoir augmenter sa production, de la diversifier en fonction des besoins du marché et de pouvoir vendre à de grandes entreprises.

Dalines Mhlanga, 29 ans, membre de l’OP Doroba, témoigne avoir beaucoup bénéficié de sa coopérative. Elle a accès aux connaissances des agents de terrain et elle a reçu une vache qui est maintenant en lactation. Le revenu de sa production quotidienne est utilisé pour financer la production agricole et pour subvenir aux besoins de son ménage.

L’étude a révélé que des initiatives spontanées mais encore timides existaient au niveau local et ouvraient la voie à des pistes de travail. Certains jeunes sont aidés par leurs parents ou par une organisation d’agriculteurs. Ils reçoivent parfois un lopin de terre ou une tête de bétail pour débuter leur activité et sont encouragés à produire et générer un revenu qui leur permet de s’agrandir et d’investir dans du petit bétail (poulets, chèvres ou porcs). Ces jeunes qui s’impliquent avec succès dans l’agriculture deviennent alors une source d’inspiration pour d’autres jeunes.

Des partenariats prometteurs

Fert coopère depuis 2022 avec deux clubs de jeunes qui, grâce aux conseils, formations, et visites d’échanges dont ils ont bénéficié produisent aujourd’hui des pommes de terre et des tomates ; deux productions pouvant se vendre facilement localement et qu’ils ne pratiquaient pas auparavant. Un de ces deux clubs est aussi parvenu à développer son élevage de porcs.

Les résultats et recommandations issus de cette étude seront prochainement débattus avec quelques jeunes ayant participé à celle-ci, et avec le comité paysan qui contribue aux orientations des actions de Fert au Malawi.

La place des jeunes en agriculture

Interroger les jeunes pour comprendre leurs difficultés

Des jeunes femmes volontaires mais peu prises en compte

Des jeunes agricultrices et agriculteurs qui montrent le chemin

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