En 2015, un petit groupe d’apiculteurs professionnels algériens, engagés pour une apiculture responsable et de qualité au niveau national, crée l’Association Nationale des Apiculteurs Professionnels – l’Anap. En 2018, afin d’animer ses chantiers techniques et sa vie associative, la jeune organisation a recruté une animatrice. Pour favoriser sa montée en compétences, l’Anap a décidé avec ses partenaires français d’organiser un voyage d’étude en France, pour l’animatrice. Le voyage a été encadré par l’Association pour le Développement de l’Apiculture Provençale – l’Adapi et Fert.
Après deux semaines passées entre septembre et octobre 2019 à rencontrer des structures collectives apicoles françaises, Meriem Hammal, l’animatrice de l’Anap, témoigne.
Fert : C’était la première fois que vous veniez en France, quelles étaient vos attentes avant ce voyage d’études ?
Meriem Hammal (MH) : Ce voyage était surtout une opportunité de rencontrer d’autres personnes faisant le même travail que moi. En Algérie, il y a peu d’organisations paysannes et encore moins d’animateurs salariés, en tout cas pas à ma connaissance. Pouvoir échanger avec d’autres animateurs, quelque part mes pairs, sur leur quotidien, la gestion des problèmes et leur rapport aux élus était une bonne manière de trouver des réponses à certaines de mes questions.
Dans un deuxième temps, l’Anap étant en pleine réflexion sur la notion de qualité des miels algériens, les pratiques apicoles et les caractéristiques des produits, il était intéressant de comprendre les expériences de différentes structures apicoles française (groupements, syndicats et coopératives) dans la mise en place d’une démarche qualité.
Fert : Que retenez-vous de ces 17 jours passés en France ? Qu’est-ce qui vous a surpris ?
MH : J’ai pu rencontrer plusieurs acteurs de la filière apicole française : apiculteurs, coopératives et groupements de producteurs, syndicats, chercheurs et conditionneurs. Pour résumer ce long voyage et ces nombreuses rencontres, j’ai trouvé la filière miel française très organisée avec une diversité et une complémentarité d’acteurs de la ruche au consommateur.
J’ai d’abord été surprise par la similarité des problématiques auxquelles font face les apiculteurs français par rapport aux apiculteurs algériens, c’est-à-dire la concurrence déloyale des miels d’importation, la dégradation de la santé des cheptels et le changement climatique.
Aussi ce que j’ai trouvé étonnant, c’est la capacité des structures collectives apicoles, pilotées par des apiculteurs, à s’asseoir autour de la table pour analyser les difficultés et à imaginer et mettre en œuvre des solutions, notamment grâce à des animateurs de qualité dont le rôle est de coordonner les activités et accompagner les élus dans leurs missions.
Sur le plan technique, j’ai pu découvrir et comprendre comment plusieurs démarches qualité avaient été mises en place, via différents signes de qualité de la marque privée à l’IGP. Cette découverte a été complétée par ma participation à des opérations de contrôle et d’analyse chez les apiculteurs et les conditionneurs sur l’IGP « miel de Provence » et la marque « Gelée Royale Française ».
Je retiens que ces démarches sont exigeantes mais restent à la portée des apiculteurs. De plus, pour fonctionner et susciter la confiance des consommateurs, les démarches de qualité sont basées sur la bonne volonté des acteurs, les apiculteurs les premiers.
Fert : Qu’allez-vous faire en rentrant ?
MH : J’ai surtout plein de paperasse qui m’attend !
Je me rends compte que la convergence des intérêts est l’élément clé pour faire avancer les chantiers au sein d’une organisation de producteurs agricoles telle que l’Anap, et susciter l’engagement des élus et des adhérents. C’est un point fondamental à travailler avec les élus de l’Anap, car certains chantiers ont été pensés et démarrés avec trop d’acteurs aux objectifs différents.
Je pense aussi y voir plus clair sur la mise en place d’une démarche qualité et ses implications en Algérie et quelle feuille de route imaginer. Il me paraît évident que certains miels algériens ont du potentiel pour monter en gamme, tels que les miels de jujubier, d’euphorbe ou encore de carotte sauvage.
D’autres éléments restent encore en réflexion pour plus tard, notamment sur l’évolution de notre association, ses besoins en ressources humaines et sa capacité à évoluer comme l’ont su faire les structures françaises que j’ai visitées.